On parle tellement de Genève actuellement, dans tous les médias et surtout ceux de la France voisine. Ah, ils se déchaînent contre les banques de la place ! Chacun y va de son couplet, qui de dénoncer ces pratiques bancaires opaques, qui de hurler contre ces banquiers sans morale, qui de livrer à la vindicte populaire ces avocats d’affaires, ces gestionnaires de fortunes.

Dans cette croisade vertueuse, il y aurait les bons gentils innocents et les très méchants salopards sans scrupules. La vérité, n’en déplaise aux donneurs de leçons, n’est pas aussi simple que cela. Genève n’est pas Sodome et Gomorrhe quand même. Mais dans les télévisions, Genève se résume à un plan séquence sur U.B.S. et un petit bout de la rue du Rhône. Pas un seul Genevois à l’horizon, pas un seul interrogé, à croire que tous sont planqués dans des coffres à compter les millions, les centaines de millions, les centaines de millions de milliards. A comprendre que tous les habitants se goinfrent de billets de banque à chaque repas et que dans chaque maison, chaque appartement, tournent des lessiveuses à blanchir l’argent. Pas une seule image de cette belle ville, de son lac, de ses musées, de ses arbres, rien. Enfin, si, nous voyons des journalistes se prenant pour Saint Just, des spécialistes qui tranchent des têtes comme autant de Robespierre, des Danton de bas étage et tous de tailler des croupières et tous d’avoir un avis définitif. Pourtant, il faut dire, il faut rappeler que le principal procureur, l’extrême accusateur, le pourfendeur de « l’exil fiscal » fut celui qui est devenu le pitoyable, le minable, le petit tout petit bonhomme de cette nouvelle chasse contre Genève. Cahuzac, s’appelle-t-il, tête de Cahuzac, face de Cahuzac, trou du Cahuzac, Cahusac merdeux. Mais laissons ce triste sire à ses hémorroïdes et ne regrettons pas que personne ne lui est expliqué ce qui arrive quand on s’essuie les fesses avec du papier monnaie. Ah, oui, pour ceux qui n’auraient pas suivis cette comédie, il est Français, vous savez, ce peuple qui donne des leçons de morale au monde entier. Et qui maintenant va se lancer dans une vaste catharsis et nous expliquer ensuite qu’ils ont trouvé la meilleure solution, qu’il faut faire comme eux, qu’il n’y a pas d’autres choix que ce que les Français vont faire. C’est ridicule et risible et folle que cette prétention. Et pendant ce temps-là, des milliers et des milliers d’emplois disparaissent chaque mois, en « optimisation fiscale » pour certains et en pertes sèches pour les autres.

Ce qui me dérange dans cette chasse aux sorcières genevoises, c’est l’inversion des rôles. Ce ne sont pas les banques qui ont permis « l’exil fiscal » ce sont les « exilés fiscaux » qui ont conduit les banques à leur proposer toujours plus, toujours mieux, toujours plus profond. Mais je vous en reparle prochainement, très prochainement.